Que signifie « engager la responsabilité pénale » ? Comment se déroule la procédure ?
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Contexte – Il s’agit de la situation où un patient, ou tout autre personne, estime avoir subi des agissements qui constituent une ou plusieurs infractions (c’est-à-dire un comportement formellement interdit par le code pénal), lors de la prise en charge ou de l’exercice de la sage-femme.

Précisons que le délai pour saisir la juridiction est de 6 ans à compter de l’acte reproché (pour les délits).

ModalitésLa procédure pénale « de droit commun » s’applique également en matière de santé. Ainsi, lorsque le Procureur de la République a connaissance de faits susceptibles de caractériser une infraction – par le biais d’une plainte ou par d’autres moyen – l’action pénale est engagée. À l’issue d’une enquête menée par les officiers de police judiciaire, le procureur de la République peut décider :

  • D’abandonner les poursuites (« classement sans suite »), notamment si l’infraction n’est pas caractérisée ou s’il estime qu’il ne dispose pas d’assez d’éléments. Cela met fin à la procédure.
  • À l’inverse, il peut décider de poursuivre, en transmettant l’affaire au juge d’instruction ou en saisissant directement le tribunal compétent.

Dans ce dernier cas, une audience a lieu et les juges peuvent, soit relaxer la personne poursuivie (en l’absence d’infraction reconnue), soit à l’inverse, reconnaitre sa culpabilité et prononcer une/des sanctions, en fonction des circonstances et de la situation d’espèce.

Objet et sanctions possibles : si la responsabilité pénale de la sage-femme est reconnue, selon la situation, une amende, une interdiction d’exercer ou encore une peine de prison peuvent être prononcées. Précisons que, même si la responsabilité pénale de la sage-femme est reconnue et qu’une indemnisation du préjudice est prononcée par le juge, elle ne pourra être condamnée personnellement à la réparation de ce préjudice (appelée « sanction-réparation » en droit pénal), dans la mesure où celle-ci est couverte par l’établissement.

+ Précisions : dans certaines enquêtes au cours d’une procédure pénale, une sage-femme peut être entendue (en audition). Aussi, une réquisition peut lui être adressée afin qu’elle produise certain document et la saisie du dossier médical peut être décidée par le juge. Par ailleurs, elle peut également être appelée à témoigner à l’audience. Dans ces situations, cela ne signifie pas nécessairement qu’une plainte est formée contre la sage-femme et qu’elle est suspectée ; dans ce cadre, la sage-femme agit en qualité de témoin (elle n’est pas une partie à la procédure).

Les étudiants sage-femmes sont-ils concernés ? Leur responsabilité personnelle peut-elle être engagée ?
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Oui. Contrairement à la responsabilité civile/administrative, la responsabilité pénale est personnelle. Cela implique que la responsabilité de la sage-femme/de l’étudiant sage-femme n’est pas couverte par celle de l’établissement ou de tout autre personne morale. Dès lors, la personne s’estimant victime d’une infraction peut agir directement contre le professionnel de santé concerné.

Précisons que ce principe est applicable aux sages-femmes comme aux étudiants sages-femmes, quel que soit le mode d’exercice et autant lors d’un stage que d’un remplacement.

Néanmoins, en cas de poursuites pénales pour des faits réalisés dans le cadre de l’exercice, les sages-femmes peuvent bénéficier de mesure d’assistance juridique ; par exemple, la prise en charge des frais d’avocats et le remboursement des frais de déplacement et d’hébergement. Cette protection est mise en place par l’employeur et applicable de la même manière aux étudiants sages-femmes.

Cela est fonction du mode d’exercice :

En ce qui concerne les établissements publics de santé/les PMI : la protection fonctionnelle est également applicable aux étudiants en remplacement ou en stage, quel que soit le cycle (en application de la circulaire du 29 mai 2024 relative à la protection fonctionnelle des personnels des établissements de la fonction publique hospitalière). Pour en bénéficier, une demande doit être faite au préalable à la hiérarchie de la structure.

En ce qui concerne les établissements privés de santé :  si la protection fonctionnelle n’est pas directement prévue, l’employeur est tout de même tenu de garantir la protection juridique « des travailleurs » dans le secteur privé (article L.4121-1 du code du travail), incluant donc les étudiants en stage ou en remplacement. Il convient de se rapprocher de la direction afin de connaître les modalités applicables à la protection juridique.

En ce qui concerne l’exercice libéral : s’il n’existe pas de protection de l’employeur à proprement parler, les mesures d’assistances juridiques seront couvertes par l’assurance de responsabilité civile professionnelle (RCP). Si l’étudiant est en stage, il sera couvert par la RCP de la sage-femme maître de stage. En revanche, si l’étudiant est en remplacement d’une sage-femme dans un cabinet libéral, il sera couvert par sa propre RCP, obligatoire dans cette situation (cf. paragraphe « notion de responsabilité et cadre général », question « en qualité d’étudiant sage-femme, dois-je obligatoirement contracter une assurance civile professionnelle ? »).

Il est donc recommandé aux étudiants, au moment de la souscription d’une telle assurance, de s’assurer que la protection est comprise dans les garanties et que les plafonds sont raisonnables.

Quelles infractions pénales peuvent être commises par un étudiant sage-femme ?
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Avant toute chose, précisons que les infractions pouvant être commises par des étudiants sages-femmes sont les mêmes que celles qui concernent les sages-femmes. Il ne s’agit pas d’une liste exhaustive et il s’agit d’un développement théorique (juridique), sans pouvoir affirmer que des étudiants sages-femmes sont couramment concernés en pratique.

En premier lieu, il est possible de citer l’infraction d’exercice illégal de la profession de sage-femme. En effet, est considéré comme une infraction le fait de réaliser des actes inhérents à la profession de sage-femme par une personne ne répondant pas aux conditions obligatoires pour l’exercer. Malgré leur formation, les étudiants n’échappent pas à cette interdiction, hors cadre du stage et du remplacement étudiant (cf. question suivante pour plus de précisions).

Par ailleurs, selon la situation et les circonstances, si l’étudiant sage-femme a manqué à une obligation de prudence et de sécurité et n’a pas respecté les diligences habituelles lors de la prise en charge d’un patient -en stage comme en remplacement – le délit de mise en danger délibéré d’autrui ou d’homicide involontaire pourrai(en)t être retenu(s) (selon le « dommage » constaté).

Si les exemples en la matière sont rares dans la jurisprudence, pour illustration, la responsabilité pénale d’une étudiante sage-femme a été engagée pour blessures involontaires, pour ne pas avoir vérifié l’identité d’une patiente avant d’administrer un médicament qui permettait la dilatation du col, ce qui a provoqué une fausse couche.

Enfin, la responsabilité pénale d’un étudiant sage-femme pourrait être engagée en cas de non-assistance à personne en danger, constituant une infraction dans le code pénal (s’appliquant de manière générale à tout citoyen). Précisons tout de même qu’à ce stade, il n’y a pas d’exemple qui concernerait spécifiquement des étudiants sages-femmes en la matière.

Dans quels cas un étudiant sage-femme peut-il se placer en situation d’exercice illégal, susceptible d’engager sa responsabilité pénale ?
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Contexte et principe Comme exposé à la question précédente, l’« exercice illégal » de la profession de sage-femme correspond à la réalisation d’actes inhérents à la profession par une personne ne répondant pas aux conditions obligatoires pour l’exercer, comme la condition de diplôme et d’inscription au tableau de l’Ordre (article L.4161-3 du Code de la santé publique).

En l’espèce, dans la mesure où il est constaté que les étudiants sages-femmes ne disposent pas encore du diplôme et ne sont pas inscrits à l’Ordre, l’interdiction d’exercice illégal s’applique également à eux.

Néanmoins, précisons que « l’exercice » des étudiants lors des stages et du remplacement autorisé (dans les conditions prévues au paragraphe 2 de la FAQ) ne constituent pas un exercice illégal de la profession de sage-femme. Ce sont les seules situations admises, cela étant confirmé par la jurisprudence (respectivement, Cass.,17 juillet 1987, n°86.94.968 et Cass.,21 juin 2022, n°21-86.825).

Exemples concretssans établir de liste exhaustive des situations, l’exercice illégal peut se manifester :

1/ Par l’acceptation, par un étudiant, d’un poste de sage-femme sans répondre aux conditions légales de diplôme et d’inscription ;

2/ Par la réalisation d’actes de sages-femmes par le biais de l’exercice d’une autre fonction au sein de l’établissement ;

3/ Par l’irrégularité du remplacement étudiant, si ce dernier ne dispose pas d’une nouvelle autorisation après l’expiration du délai de trois mois.

4/ Par la falsification délibérée de cette dernière ou du diplôme de sage-femme. Au-delà de l’exercice illégal, ce comportement constituerait l’infraction de faux et usage de faux et/ou d’usurpation de titre en fonction des circonstances.

Précisons que le fait que les conditions légales ne soient pas vérifiées par l’employeur ou que celui-ci donne tacitement ou informellement son accord n’exonère pas l’étudiant sage-femme de sa responsabilité personnelle. Néanmoins, l’employeur, ainsi que de toute personne ayant eu connaissance de cette situation sans l’empêcher ou en la facilitant, pourrait voir sa responsabilité pénale engagée pour complicité d’exercice illégal (constituant de la même manière une infraction, en application de l’article L.4161-3 du Code de la santé publique).

Risques Comme déjà exposé, l’exercice illégal constitue une infraction pénale, susceptible d’engager la responsabilité de l’étudiant, susceptible d’être puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende (article L.4161-5 du Code de la santé publique).

À l’inverse, dans quelles situations un étudiant sage-femme pourrait-il saisir les juridictions pénales à l’encontre d’une sage-femme ou d’un autre professionnel de santé ?
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Situations concernées – Un étudiant sage-femme peut porter plainte lorsqu’il estime qu’il a subi des agissements qualifiables d’infraction, notamment de la part de patients dans le cadre de leur prise en charge, ou encore par d’autres professionnels de santé dans le cadre d’un stage ou d’un remplacement étudiant.

Pour illustration, cela peut être le cas d’un étudiant sage-femme qui, au cours du stage, estime qu’un professionnel de santé encadrant a eu un comportement de harcèlement à son égard (cela est proscrit par l’article 222-33-2-2 du code pénal). Cela vise également la situation ou l’étudiant a été victime d’agression sexuelle (article 222-22 du code pénal). Aussi, cela concerne la situation d’un étudiant sage-femme qui a subi des violences physiques ou psychologiques (des menaces par exemple) de la part de patient.

Dans ces différentes situations (non-exhaustives), l’étudiant sage-femme peut porter plainte directement au commissariat. Les faits seront portés à la connaissance du procureur de la République, qui pourra engager les poursuites pénales.

Protection par l’employeur Dans la situation où une sage-femme/étudiant sage-femme subit une attaque liée à ses fonctions (comme des violences physiques morales ou matérielles, des injures, des outrages, des menaces ou du harcèlement), cette dernière peut bénéficier de mesures de prévention et de protection, mises en place par l’employeur.

Les mesures mises en œuvre dépendent de la situation et de la décision de l’établissement, mais concrètement, l’employeur peut choisir d’engager des actions pénales, en signalant les faits aux autorités policières ou judiciaires ou en portant plainte. Un soutien moral peut également être prodigué, par le biais d’autres mesures internes adaptées en fonction des circonstances de l’espèce (lettre, entretien, accompagnement de l’agent, conciliation). Aussi, dans l’hypothèse où les comportements inappropriés proviennent d’un autre salarié, une enquête administrative – accompagnée ou non de mesures conservatoires – pourrait être diligentée en interne.

Les modalités d’application sont fonction du mode d’exercice :

  • Pour les établissements publics de santé et les PMI, ce mécanisme est nommé protection fonctionnelle – applicable aux étudiants en remplacement ou en stage – qui doit être demandé au préalable à la hiérarchie ;
  • Les établissements privés de santé doivent garantir la protection juridique « des travailleurs », pour laquelle il convient de se rapprocher de la direction, afin de connaître les modalités applicables à la protection juridique.
  • Pour ce qui concerne l’exercice en cabinet libéral, s’il n’existe pas de protection de l’employeur à proprement parler, il convient de se rapprocher directement de l’assurance responsabilité civile (RCP) de votre maître de stage ou de votre propre RCP si vous êtes en remplacement.

Autres interlocuteurs – S’il est parfaitement compréhensible que l’étudiant sage-femme se trouvant dans une telle situation craigne d’engager l’action pénale, il est possible de prendre attache avec le conseil départemental concerné ; il s’agit en effet d’une autorité habilitée à signaler les infractions au procureur de la République. Solliciter directement l’aide ou le soutien de l’école de sage-femme est également possible.